Le Metroidvania devient tendance ces temps-ci. Entre de vieilles franchises comme Wonder Boy avec Monster Boy and the Cursed Kingdom, Metroid avec Metroid Dread et dorénavant Prince of Persia avec ce The Lost Crown, ce genre de jeu auparavant de niche commence à gagner en popularité. Chapeauté par l’équipe d’Ubisoft Montpellier, visiblement adepte des jeux de plates-formes 2D (ayant développé globalement à peu près tous les jeux principaux Rayman, dont plutôt récemment l’excellentissime Rayman Legends), on était en droit d’avoir de grandes attentes envers ce studio. Ont-ils réussi le pari de réaliser un bon Metroidvania en utilisant cette franchise culte ? C’est ce que l’on va découvrir dans ce test.
Date de sortie : | 18 janvier 2024 |
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Développeur - Éditeur : | Ubisoft Montpellier - Ubisoft |
Supports principaux : | PC, Switch (support testé), PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series X |
Metroidvania à quel point ? | Très fortement, Prince of Persia: The Lost Crown remplit parfaitement les conditions d'un Metroidvania (un monde qui se dévoile de plus en plus à force d'acquérir de nouvelles capacités). |
Durée de vie : | Entre 20 et 30 heures |
Difficulté : | Corsée (Joué en difficulté "Guerrier" (Normal)) |
Prix : | 49,99€ |
OUVRONS UNE PARENTHÈSE
D’abord, je voudrais qu’on discute deux secondes sur le prix du jeu (à son lancement) : 50 euros…Vous êtes au courant qu’il y a d’autres jeux du même genre légendaires à un prix beaucoup plus faible ? Quand bien même la durée de vie est plutôt conséquente (20-30 heures), ce tarif quasiment digne d’un AAA est légèrement abusif. Notons aussi qu’il n’est pour le moment pas sortie sur Steam, mais uniquement sur l’Epic Games Store et sur l’Ubisoft Connect (naturellement)… Ahhh, j’adore quand les studios prennent tellement le melon qu’ils se sentent obligés de nous infliger un énième launcher pourrave. Finalement, j’ai pu l’obtenir sur la Nintendo Switch (pour une fois qu’elle ne prend pas la poussière) à un prix d’environ 35€, que je trouve beaucoup plus raisonnable.
En l’espace d’environ deux semaines, celui-ci s’est tout de même écoulé à 300 000 exemplaires, dégageant ainsi 15 millions de revenus. Pour une franchise qui n’est plus autant en vogue qu’avant avec un prix parfois plus de trois fois élevé par rapport à la concurrence (et je ne parle pas que d’Hollow Knight, qu’on soit clair), ce sont des chiffres qui paraissent tout à fait corrects. Pas pour Ubisoft dont la rumeur court que Prince of Persia : The Lost Crown a des ventes décevantes. J’ai une question : Vous croyez que votre franchise c’est Pokémon ? Quand bien même le Metroidvania gagne en popularité, cela reste encore un genre relativement de niche qui n’intéresse pas tous les joueurs. Pour moi, un article de DualShockers résume très bien le souci en deux points : Prince of Persia est une franchise culte, mais plus aussi populaire qu’il y a 20 ans, et le titre est vendu beaucoup trop cher (30€ aurait été idéal, il me paraît fort probable qu’on le trouvera à ce prix facilement dans quelques mois).
Enfin, le lendemain après la sortie de ce PoP : The Lost Crown, devinez quel gros titre s’écoule à des millions d’exemplaires à une vitesse fulgurante ? Palworld… Difficile d’imaginer une pire fenêtre de sortie, surtout quand on ajoute une énième suite d’une franchise à succès : Yakuza 8. Visiblement, le bon sens n’est pas donné à tout le monde.
Pour moi, ce n’est pas un échec commercial compte tenu des paramètres cités. Donc, aux personnes responsables de telles conclusions, je ne veux pas être brusque, mais il serait peut-être temps de revoir ses ambitions. C’est triste pour toutes les personnes passionnées derrière ce projet que cela soit considéré comme un « échec » alors qu’en y réfléchissant bien, ce ne l’est pas. Bref, démarrons le test.
LES BOUTONS, JE (ME) LES PRESSE. LES ENNEMIS, JE LES PERSE
Dans la catégorie du « Easy to learn, hard to master », Prince of Persia : The Lost Crown se positionne bien, vos premières heures à combattre dans ce grand Metroidvania ressemblera plus à une tentative étrange de faire de la capoiera qu’à attaquer réellement efficacement. Mais à force de tenter, de tenter et de retenter, au-delà des améliorations que le joueur recevra, celui-ci se montrera plus habile avec Sargon, le protagoniste du jeu. La quête principale consistera à retrouver le prince enlevé pour être retenu au Mont Qaf où des événements très étranges s’y passent. Si le titre ne brillera pas pour son scénario au premier abord, plus on avance, plus des rebondissements se passent et on finit par être plus happé par une histoire qui semblait au postulat très quelconque. Je regrette néanmoins que certaines cinématiques soient franchement longues, pas mal d’interactions lors de ces scènes auraient gagné à être mieux rythmées. Néanmoins, on ne peut pas dire que ces moments ne manquent pas de classe et on ressent effectivement l’inspiration pour les animes.
Courage Sargon, t’es pas loin du double-machin ou du truc-mural ou chépakoi !
Des inspirations, les développeurs en ont eu aussi beaucoup pour leur gameplay. Pas la peine de cacher l’éléphant dans la pièce plus longtemps… Hollow Knight ? Ramène tes charmes qui s’appelleront cette fois des amulettes, aussi, le cartographe qui chantonne quand on s’approche de lui… Oh ! Les larves aussi, bah ce seront des jarres ! Bref, j’arrête ce sarcasme injustifié pour des mécaniques qui ont pourtant fait leurs preuves. L’important est surtout que tout serve convenablement le gameplay, et que les emprunts ne se transforment pas en une soupe indigeste de références et autres clins d’œil tel un type faisant du name-dropping pour cacher la faiblesse de ses arguments (comment ça, moi ?). Pour Prince of Persia : The Lost Crown, n’ayez crainte, le gameplay est globalement excellent. Que vous soyez un amateur de combats nerveux et rapides où les timings demandés pour esquiver et bloquer soient exigeants, ou un fan absolu de plateforming exigeant à la Celeste (ou dans une moindre mesure, Aeterna Noctis), n’importe qui y trouvera son compte. Et le plus important, même si The Lost Crown demandera une certaine exigence au joueur, il peut être joué, apprécié, et fini par n’importe quel joueur. En terme de paramétrage et d’options « quality of life », je n’ai jamais joué à un Metroidvania qui pousse la chose aussi loin.
Je vais vider votre magasin quand je serai riche, soyez-en certaine.
C’EST TROP DUR ? PAS LA PEINE DE FAIRE PREUVE DE MASOCHISME
Je suis actuellement dans les paramètres, faisons le point de tout ce que propose ce Prince of Persia pour vous faciliter la vie (ou vous rendre la tâche plus ardue si vous souhaitez un peu de piment dans votre aventure) :
- Aide à la visée, notamment sur l’arc
- Aide au ciblage en mêlée, pour être toujours face à son adversaire (croyez-moi, on tranche souvent le vide sans trop savoir pourquoi).
- Aide plateforme permettant littéralement de passer certains passages délicats en terme de plateforming
- Dégel automatique, une option que j’aurais dû activer plutôt que mastiquer les boutons sur cette pauvre Nintendo Switch (elle est traumatisée).
Et j’en passe des meilleurs… Ah si, les difficultés. Quatre vous en seront proposés au début du jeu (l’équivalent de « Facile, Normal, Difficile, Au secours »), mais si cela ne vous convient pas et que vous souhaitez faire vos petits bidouillages (coquinou, va), une cinquième difficulté permettra de tout personnaliser : Dégâts des ennemis (au point qu’il ne vous fasse que 10% de leurs dégâts initiaux) et des environnements, santé des ennemis, précision dans le timing des parades (petite note : rater une parade augmente les dégâts, et en tant qu’amateur de GRIME, cela me rend triste) ou encore la vitesse de remplissage de la barre d’Athra (une jauge permettant de déclencher des attaques spéciales qu’on débloque au fil de notre progression en accomplissant certaines tâches).
Ne vous inquiétez pas, bientôt j’en aurai beaucoup !
J’ai gardé le meilleur pour la fin, si vous êtes un joueur du style « Où est-ce que je dois aller ensuite bordel ? », vous pouvez activer une option pour être guidé. Ainsi, vous n’aurez qu’à profiter du spectacle. Ce sont des options simplement géniales qu’on aimerait trouver dans certains Metroidvania qui semblent apprécier que le joueur tourne en rond plus que de raison. Pour un genre réputé pour ses jeux relativement exigeants (une réputation que je trouve légèrement exagérée), Prince of Persia : The Lost Crown est l’exemple typique du jeu qu’on peut donner à presque n’importe qui pour lui faire découvrir un tout nouveau genre sans le déstabiliser. Chapeau bas.
UN GROS GÂTEAU DONT TOUT LE MONDE AURA SA PART
S’il y a un truc fort étonnant que j’ai remarqué avec les Metroidvania, c’est à quel point ceux-ci peuvent proposer des expériences différentes. Certains sont beaucoup plus basés sur la résolution de puzzles et d’énigmes, d’autres sur des séquences de plate-formes très exigeantes, ou encore ceux sur des combats demandant des réflexes de ninja et des enchaînements épuisants de combos dévastateurs. Prince of Persia : The Lost Crown, lui, il fait tout. Il faut voir ce Metroidvania comme par exemple, ce mythe du développeur rockstar, vous savez, ce développeur incroyablement compétent qui te pond du code super complexe parfaitement bien plus rapidement que moi lorsqu’il s’agit d’écrire un test intéressant. Et par dessus le fait qu’il fasse tout, et surtout très bien. Jamais un aspect du jeu semble exécuté maladroitement. C’est plus des légères étourderies disons-le.
Gros cerveau avoir bobo.
Justement, si on devait citer les potentiels défauts de l’aventure proposée, je dirais que le premier quart semble avoir un peu de mal à démarrer. A cause du manque flagrant de capacités qu’on possède, le chemin semble au premier abord tout tracé. Ne vous y méprenez pas, au bout de quelques heures, vous aurez beaucoup de choix à votre disposition pour évoluer comme bon vous semble. Ensuite, alors qu’il serait agréable de pouvoir se téléporter entre les points de sauvegarde, les développeurs ont eu la mauvaise idée de créer une structure différente supplémentaire, moins nombreuse, afin de pouvoir se téléporter. En résulte vers la fin du jeu du backtracking de plusieurs longues minutes afin de récupérer le moindre « machin-truc ». Et je ne parle pas du menu de téléportation qui finit par devenir une liste d’une vingtaine de choix vers la fin, ce qui fait que trouver le bon téléporteur n’est pas immédiat, dommage ! Par ailleurs, je finissais même au bout d’un moment par suicider Sargon afin de m’épargner le retour et revenir directement au dernier point de sauvegarde pour gagner du temps.
Et encore, vous m’avez pas vu le faire sans les mains !
PLUS DE VINGT HEURES DE BONHEUR
La diversité est en tout cas clairement de mise, proposant des biomes très différents baignés par la culture de l’empire de Perse antique (à confirmer, j’ai eu 8/20 au bac d’histoire-géo), on a même une grosse zone dans les égouts (et oui, je sais que vous adorez ça) ! Bon, j’ai jamais été la personne idéale pour vendre des vacances, mais… Bon voilà, veuillez visiter cette magnifique et grande citadelle avec ses pièges mortels ! La magnifique Forêt Hyrcanienne et sa végétation qui vous servira de plates-formes, ou encore la Tour du Silence qui, malgré son climat glacial, peut être gravie sans s’inquiéter du froid (sans déconner Sargon, mets au moins un t-shirt, tu vas attraper froid). Chaque environnement à sa propre identité et s’ennuyer est impossible, en plus de posséder une grande durée de vie, l’équipe d’Ubisoft Montpellier a pris son d’accompagner chaque zone de ses mécaniques et pièges qui leurs sont propres. Aussi, un bestiaire qui se renouvelle en permanence avec des comportement suffisamment intelligents pour qu’on ne leur roule pas dessus vous tiendra compagnie, un beau dépaysement en perspective vous attend, en somme.
Je veux que l’on s’arrête deux secondes pour parler de cette mécanique formidable : Prendre des screenshots de passages nous intriguant pour les visualiser sur la carte. Une feature simplement incroyable pour moi qui a tendance à revenir aux endroits où je ne pouvais pas aller précédemment… Avant de me rendre compte que je ne peux toujours pas y accéder car je n’ai toujours pas le pouvoir qu’il faut. Merci !
Et qu’en est-il des boss ? Toujours un bilan positif (sauf l’archer qui se réincarnera probablement dans quelques siècles en un sniper campeur sur Call of Duty tant il passe son temps à fuir). Les affrontements sont plutôt longs, se déroulent en plusieurs phases et sont d’une difficulté globalement idéale. Ici, on est bien plus sur les réflexes et l’apprentissage par l’échec pour s’en sortir. Les prises de décision foireuses en un quart de seconde et les stratégies daubées seront les clés survivre. Que ceux qui aiment se préparer soient rassurés, il y a quelques quêtes secondaires et d’endroits optionnels à visiter au Mont Qaf pour rendre Sargon plus puissant et résistant. Faites un tour auprès des marchands de temps à autre pour dépenser vos cristaux (que vous finirez par accumuler sans trop savoir quoi en faire à la fin) afin de rendre vos armes plus efficaces et améliorer vos amulettes préférées (#TeamJeMeSoigneEnParantLesEnnemisGRIMEmaTuer).
Oh mon Dieu ! Sargon ! FUIS ! Le Hentai arrive pour ton GROS CULLLL !!!
Enfin, si vous êtes toujours un peu lassé de voir certains mêmes pouvoirs dans les Metroidvania, sachez que qu’il y a des capacités à débloquer très originales qui feront que même un habitué du genre aura son lot de surprises. L’une des plus grandes forces de Prince of Persia : The Lost Crown repose sur le fait d’avoir réfléchi pertinemment à comment faire un Metroidvania réussi, avec le budget que peut se permettre un grand studio comme Ubisoft. En résulte de très chouettes cinématiques où on sent que les transformations en Super Saiyan ont dû donner (et donnent encore) des étoiles aux yeux à l’équipe derrière ce très bon Metroidvania. On se sent carrément puissant quand on utilise une des attaques spéciales proposées en échange d’une ou plusieurs jauges d’Athra remplies. A noter que l’un des personnages propose des petits tutoriels pour savoir comment exécuter des combos longs, efficaces et destructeurs… Même si entre nous, on sait tous qu’on semi-bourre les boutons en comprenant à moitié ce que l’on fait.
Ouhhh, il est pas content ! Si j’étais vous, je ne resterai pas planté là comme un piquet.
« ET EN PLUS LUI, IL PEUT REMONTER LE TEMPPPPS ! »
C’est rare que je joue sur console, mais pour une raison qui m’échappe à moi-même (l’être humain est une espèce, effectivement, paradoxale), j’ai une Nintendo Switch. Je ne vais pas vous donner mon avis sur celle-ci, mais c’est simplement pour vous dire que The Lost Crown tourne relativement bien dessus, malgré quelques micro-freeze et chutes de FPS, c’est très jouable et il n’y a pas vraiment de quoi se plaindre. Qui plus est, les graphismes sont franchement beaux malgré les éternelles « il y a quelques textures baveuses » et autres reproches qu’on donne à un peu près tous les jeux de la Terre. Nan, soyons honnête, c’est un excellent boulot, surtout au niveau des animations qui sont extrêmement fluides (une nécessité absolue quand le gameplay se tient beaucoup sur les esquives et les parades à un timing précis). Les lumières sont très bien travaillées, les impacts envoient du lourd, bref, je n’ai pas grand-chose à dire. Pour la musique, mon avis sera très bref, elles sont très bonnes, mais jamais aucune ne m’est restée en tête, disons qu’elles servent l’ambiance et c’est dommage qu’à la manière d’un Castlevania, elles ne soient pas plus entraînantes. Mais c’est peut-être pour le mieux afin d’éviter un potentiel hors-sujet qui nous sorte de l’ambiance proposée (j’adore toujours comment tous les Dynasty Warriors ont une bande-son très rock absolument pas dans le ton, mais ça fonctionne quand même).
J’en ai des plus gros dans ma chambre, c’est pas ça qui va m’effrayer.
Etant donné qu’Ubisoft (et pas qu’eux, sortir les jeux à la va-vite pour rassurer les actionnaires est devenue une réalité attristante, et les développeurs en prennent évidemment pour leur grade) est malheureusement connu pour sortir des jeux buggés comme pas permis, je suis heureux de vous annoncer que… Prince of Persia : The Lost Crown est sorti dans un très bon état ! J’ai eu deux-trois petits problèmes à base d’un PNJ donneur de quêtes qui me softlock et m’oblige à redémarrer le jeu ou une des cinématiques du départ qui se relance car je suis repassé à un endroit pas trop prévu dont je m’y rende, mais en dehors de ça, nickel.
Je désire aller partout.
POINTS NEGATIFS
- Quelques très légers bugs (qui ont dû être corrigés depuis)
- Des musiques qui servent très bien l’ambiance, mais qu’on oublie directement après les avoir entendues.
- Les checkpoints auraient dû servir de téléporteurs.
- Un premier quart de jeu un poil trop linéaire et classique.
POINTS POSITIFS
- Un gros Metroidvania réalisé avec brio de bout en bout.
- Un gameplay hyper diversifié.
- Des combats haletants où les combos et les esquives s’enchaînent sans temps mort.
- Des énigmes juste ce qu’il faut en difficulté (sauf un tout petit nombre, mais je pinaille).
- Beaucoup de choses optionnelles à faire, un jeu autant adapté aux speedrunners qu’aux complétionnistes.
- C’est franchement très beau !…
- … et ça tourne bien sur Nintendo Switch !
- Durée de vie très satisfaisante (20 à 30 heures, voire moins pour les plus rapides) qui ne traîne pas en longueur.
- Un scénario qui se révèle bien plus captivant qu’il en a l’air.
- J’en parle à peine, mais prendre des screenshots des points d’intérêt, c’est génial !
Rétroliens : The Rogue Prince of Persia - RVLP