[TEST] Touhou Luna Nights – Un Shoot’em Up dans un Metroidvania ?

NOTE : Le test commence au bout de quelques paragraphes, on va d’abord expliquer rapidement Touhou Project aux néophytes.

Touhou Project, cette franchise au nom plutôt farfelu n’évoque probablement rien pour beaucoup de monde. Pourtant, il s’agit d’une saga avec une fanbase gargantuesque et il est même extrêmement probable que vous ayez déjà vu quelque chose en rapport avec celle-ci. De temps en temps associé à une image de franchise pour weeb acharné, il s’agit pourtant à la base d’une saga de Shoot’em Up vieille d’environ 25 ans. Au final, c’est quoi Touhou Project ?

Touhou Project est au départ une série de Shoot’em Up typé Danmaku (sauf exception du premier opus, une variante de casse-brique et de multiples jeux de combat survenus après) ayant débuté sur le micro-ordinateur japonais NEC PC-9801. Au fil des opus, les jeux sont devenus plus qualitatifs (surtout à partir du quatrième opus car les trois premiers étaient tous très différents l’un de l’autre, et à mon sens pas réussis) et c’est surtout à partir du premier opus sorti sur Windows, Touhou 06: Embodiment of Scarlet Devil en 2002 que le succès fut au rendez-vous. Encore aujourd’hui, le sixième opus reste le plus célèbre de la franchise. C’est à partir de ce moment-là, notamment grâce à Internet qui commençait à se démocratiser dans certains foyers qu’une communauté très créative commença à créer une quantité phénoménale d’œuvres. Mais comment une franchise qui en temps normal, s’adresserait à un public aussi « de niche » a pu gagner un tel succès ?

Pour la faire courte, on peut citer plusieurs faits intéressants qui expliquent un tel succès :

– Les jeux en eux-mêmes, les Shoot’em Up ne sont pas reconnus comme étant des jeux faciles. La difficulté la plus élevée dans les Touhou Project, Lunatic, est très populaire pour représenter un challenge gigantesque. Cela donne des vidéos de gameplay vraiment impressionnantes où on voit des joueurs réussir l’impensable. Personnellement, mon opus préféré est Touhou 08: Imperishable Night, mon second Shoot’em Up préféré (le monumental Radiant Silvergun étant au sommet).

– La bande-son des jeux. En général extrêmement appréciée (moi y compris), celle-ci est sujette à de très nombreux remixes. Des groupes se sont même spécialisés dans les remixes des musiques de Touhou Project.

– Le lore ainsi que les personnages, dans la (quasi-)totalité des jeunes femmes. Cela change des traditionnels vaisseaux spatiaux qu’on voit dans une majorité de jeux du genre. Il faut savoir que l’unique créateur des jeux Touhou Project (excepté les jeux de combat, réalisés par une équipe tout de même assez modeste), ZUN, n’est pas très bon pour dessiner ses personnages, qu’on peut qualifier même de « brouillon ». Ce défaut inhérent à la franchise fait l’une des forces majeures de la communauté, qui se voit libre d’interpréter comme bon lui semble l’apparence « physique » d’un personnage (parfois assez… osée, m’enfin, évitons de rentrer dans les détails, je sais pas s’il y a beaucoup d’enfants qui lisent VaniaHero).

– Enfin, je finirai par les produits dérivés qui sont très nombreux. Mangas officiels ou non (Les dōjinshi), des clips d’animation (celui-ci est énorme), des artworks à n’en plus fini et surtout ce qu’il va nous intéresser là, des fan-games, comme Touhou Luna Nights (magnifique transition).

(Voici mon thème préféré de Touhou Project, au passage)

Touhou Luna Nights est un jeu développé sorti le 25 février 2019 par la Team Ladybug à qui l’on devait déjà Shin Megami Tensei: Synchronicity Prologue (gratuit au passage) en 2017. Mais aussi plus récemment Record of Lodoss War: Deedlit in Wonder Labyrinth (on remarque deux points communs très flagrants avec ces trois jeux, ce sont non seulement tous des metroidvania, mais aussi des jeux adaptés de franchises typiquement nippones avec une fanbase très active). Sorti sur PC, Nintendo Switch et Xbox One, le titre nous invite à traverser un univers parallèle ressemblant au Gensokyo (l’univers où se passe Touhou Project) en prenant le contrôle de Sakuya Izayoi, invitée pour parcourir les zones dans le but de divertir Remilia Scarlet. Malheureusement, celle-ci est au départ privée de ses pouvoirs, en particulier celui d’arrêter momentanément le temps. Le but de la servante de Remilia Scarlet sera donc de parcourir les lieux à la recherche de ses compétences perdues et retourner chez elle (…pour servir le thé, bon sang, ce que la vie de bonne doit être ennuyeuse).

La structure des différentes zones fait largement référence aux Castlevania à tel point que ceux qui ont joué à Symphony of the Night pourront même trouver que certains passages ressemblent un peu trop à ce célèbre opus. Néanmoins, Touhou Luna Nights trouve suffisamment d’idées originales et intéressantes pour éviter de passer pour une pâle copie du titre de Konami. Très inspiré d’un personnage de JoJo’s Bizarre Adventure, Sakuya peut balancer plusieurs couteaux dans moultes directions au prix de quelques MP par utilisation, mais surtout avec l’obtention d’une montre très tôt dans l’aventure, la capacité d’arrêter le temps. Cela permet de non seulement se sortir de diverses situations très tendues ou de préparer des lancers de couteaux qui seront projetés à l’ennemi au moment où le temps reprendra son cours normal. À cela, manipuler la « vitesse » du temps (qu’on peut ralentir, qui plus est) est l’élément central du jeu, qui interviendra dans de nombreux passages où de la précision est demandée. N’oublions pas aussi qu’en haut de l’écran est affiché un compteur, si celui-ci atteint 0, notre servante ne pourra plus stopper le temps qui reprendra une vitesse normale. Cette mécanique est très intéressante et bien implémentée, même si on pestera un compteur qui remonte parfois un peu trop lentement. Contrôler le temps servira à la fois pour de petits moments de réflexion ou lors d’ennemis assez coriaces. La maîtrise du temps sera primordial afin de vous en assurer la victoire.

Le graze, une mécanique présent dans certains Shoot’em Up (dont Touhou Project) consiste à avoir des bonus si le joueur frôle un élément dangereux. Cela a été rajouté dans Touhou Luna Nights où deux types de graze sont disponibles, le bleu et le rouge. Le bleu s’obtient lorsqu’on frôle d’extrêmement près un ennemi alors que le temps n’est pas complètement arrêté, ce qui permet de régénérer toutes ses jauges (HP, MP et le compteur pour arrêter le temps). Le rouge, moins risqué, est gagné quand on frôle un adversaire à une distance assez proche, régénérant néanmoins moins de MP ainsi que le compteur, mais aucun HP. Probablement l’une des meilleures idées du jeu, le graze est savamment bien implémenté tandis que le risque peut être récompensé si le joueur se débrouille correctement. Si le jeu n’est pas non plus très difficile, il comporte néanmoins son lot de challenge et quelques boss forceront presque à devoir « grazer » les projectiles qui peuvent fuser à l’écran (notamment lors de certains patterns où le potentiel de graze est parfois si élevé qu’on peut passer d’une barre de santé presque vide à totalement remplie en l’espace de quelques secondes).

Tant qu’on y est, parlons des boss qui représentent l’un des gros intérêts du titre. Si certains peuvent s’avérer plus coriaces que d’autres, le challenge est suffisamment raisonnable pour ne pas décourager un joueur dont la difficulté trop élevée d’un jeu pourrait le rebuter. Sauf à la limite l’ultime zone du jeu (qu’on peut considérer comme bonus) qui accumule vers la fin des passages vraiment frustrants, bourrés d’ennemis demandant des dizaines de couteaux pour être vaincus. Dommage de terminer sur une note aussi frustrante ! À noter que les boss proviennent majoritairement de Touhou 06: Embodiment of Scarlet Devil, malgré quelques exceptions.

Je vais d’ailleurs en profiter pour énumérer quelques défauts énervants du jeu, car malgré les multiples éloges que j’ai pu faire, Touhou Luna Nights peut s’avérer réellement désagréable par moment. Premier point, quand on change d’écran, il peut arriver qu’on se prenne un ennemi en pleine face sans qu’on ait pu avoir le temps de réagir. Un problème qui aurait pu être très facilement évité. Second point, quelques ennemis sont super énervants, je pense surtout à ces sortes de fantôme qui évitent nos couteaux à maintes reprises, franchement on aurait pu s’en passer. Enfin dernier point, on a une sensation de montée en puissance assez faible. Les Level Up n’augmentent que trop doucement les statistiques, et vers la fin ça prend des plombes pour gagner un niveau (alors qu’au départ, cela monte vraiment rapidement). Il y a bien aussi les cristaux qu’on peut vendre à la kappa Nitori (ayant un shop très simpliste et globalement inutile), on peut aussi choisir de les garder pour à la place  avoir une amélioration de nos statistiques, mais ils sont tellement peu efficaces que même après avoir farmé vers la fin du jeu, je me demandais si tout cela avait au final servi à quelque chose.

Graphiquement, on est sur du pixel-art de très haute gamme, la Team Ladybug offre un résultat remarquable avec des animations d’une très grande fluidité, notamment en ce qui concerne l’eau ou encore la protagoniste en elle-même. Autant vous laisser la surprise de découvrir les différents boss qui vous offriront probablement les moments les plus spectaculaires du jeu. Malheureusement, comme dit précédemment, à trop vouloir ressembler aux Castlevania typés « Metroidvania », tout cela finit par manquer d’identité et à ne plus surprendre après la surprise de ce pixel-art maîtrisé, en plus, les multiples effets peuvent parfois rendre l’action confuse. Malgré cela, Touhou Luna Nights se parcourt avec plaisir de ce point de vue-là. La bande-son est composée en très grande majorité de remixes extrêmement entraînants. Si l’une des forces des Shoot’em Up Touhou Project est de proposer des thèmes qui restent mémorables, on peut dire que le pari est réussi. Chaque boss voit son propre thème remixé et il m’a semblé qu’aucun thème était réellement en deçà des espérances. Autant dire que le fan prendra très rapidement ses marques, tandis que le néophyte découvrira d’excellentes musiques.

Un conseil, évitez de foncer pour terminer le jeu, vous le finiriez trop vite. Si vous faites la campagne principale sans l’Extra Stage, vous n’en aurez que pour quatre petites heures avant de finir le titre qui est malheureusement assez court, en plus d’être ultra dirigiste, les seules fois où vous retournerez dans les zones précédentes seront pour accéder à des zones (offrant des améliorations pas forcément négligeables, mais qui auraient permis d’avoir une meilleure sensation de montée en puissance, qui reste tout de même trop faible). Pour terminer le titre à 100%, vous pouvez rajouter entre 2 et 4 heures, tout dépendra de votre capacité notamment à battre l’ultime boss, qui est très difficile.

POINTS POSITIFS

  • Un Metroidvania qui respecte la franchise Touhou Project.
  • Le fait de pouvoir moduler le temps permet de vraiment appréhender les combats différemment.
  • Le graze ! Une excellente idée !
  • Un pixel-art vraiment soigné.
  • Des remixes de fou !

POINTS NÉGATIFS

  • Se prendre un ennemi dans la gueule quand on change de tableau.
  • Action parfois un peu confuse.
  • Certains ennemis sont vraiment chiants parfois !
  • Sensation de montée en puissance assez absente.
  • Durée de vie plutôt courte.

Malgré quelques défauts pouvant s’avérer gênant, nous avons le droit à un Metroidvania assez bref, mais avec beaucoup de bonnes idées parfois gâchées par quelques maladresses pouvant rendre l’expérience moins agréable. Néanmoins, que vous connaissiez la franchise de ZUN ou non, tout le monde est invité à passer un bon moment sur ce titre très sympathique.

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